Réunis à Accra au Ghana pour un sommet extraordinaire, les participants de la CEDEAO ont opté pour des mesures très dures comparables à celles prises deux ans plus tôt.
« Ces sanctions supplémentaires comprennent, premièrement, le retrait des ambassadeurs de tous les États membres de la CEDEAO au Mali ; deuxièmement, la fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays de la CEDEAO et le Mali », détaille Jean-Claude Brou, président de la Commission de l’organisation.
« Troisièmement, la suspension de toutes les transactions commerciales et financières entre les États membres de la CEDEAO et le Mali, à l’exception des produits suivants : les produits alimentaires essentiels, les produits pharmaceutiques, les fournitures et équipements médicaux, y compris les matériels de contrôle du Covid-19, les produits pétroliers et l’électricité. Quatrièmement, le gel des avoirs de la République du Mali dans les banques centrales de la CEDEAO ».
Lors de son discours, le président de la Commission a jugé que la proposition de la junte « prendra en otage le peuple malien pendant les cinq prochaines années ».
En août 2020, le groupe économique avait suspendu le Mali de tous ses organes de décision, une sanction encore en vigueur. Elle avait également fermé les frontières terrestres et aériennes, en plus d’un embargo sur les échanges financiers et commerciaux, à l’exception des produits de première nécessités.
Les sanctions avaient finalement été levées un mois et demi plus tard. Et la CEDEAO avait obtenu l’engagement des militaires à organiser des élections législatives et présidentielle en février 2022.
Récemment, la CEDEAO a déjà mis en place certaines mesures, comme le gel des avoirs financiers et l’interdiction de voyager à 150 personnalités et à leurs familles, qu’elle estime coupable de faire obstruction aux élections.
Fait exceptionnel, la réunion de ce dimanche a eu lieu juste après que certains des participants aient pris part à un autre sommet, celui de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Les dirigeants ont alors exprimé leur « fermeté » à l’encontre de la junte malienne, explique un participant souhaitant rester anonyme.
Quatre années de transition
Samedi, deux ministres du gouvernement militaire maliens avaient soumis à la CEDEAO leur calendrier de « transition » jusqu’au transfert du pouvoir aux civils. « La contre-proposition malienne est une transition de quatre ans. C’est de la rigolade », a commenté un haut responsable ghanéen, également sous couvert d’anonymat.
La junte, qui demandait tout d’abord jusqu’à cinq années de transition, a finalement modifié sa proposition, dans le souci de « maintenir le dialogue et une bonne coopération avec la CEDEAO », a déclaré le ministre des Affaires Etrangères Abdoulaye Diop.
Depuis le premier Coup d’Etat en août 2020, suivi par celui de mai 2021, amenant le colonel Assimi Goïta comme président de transition, l’organisation économique demande un retour du pouvoir aux civils, dans les plus brefs délais.
Pour la CEDEAO, il s’agit de défendre ses principes fondamentaux de gouvernance et de contenir l’instabilité régionale.
La junte demandait déjà cinq années de délais, avant de céder sous pression. Les autorités maliennes se disent désormais incapables de tenir l’échéance, évoquant le second coup d’Etat, l’insécurité persistante dans le pays, le djihadisme, etc. Selon elles, il est nécessaire de mettre en place certaines réformes pour la bonne tenue de futures élections.
Sanctions
C’est la huitième fois que les dirigeants de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest se réunissent pour évoquer la situation malienne depuis août 2020. Lors du sommet du 12 décembre, les dirigeants avaient déjà menacé de prendre des sanctions « économiques et financières » supplémentaires.
« La prorogation de la durée de la transition à cinq ans préoccupe l’ensemble de la région ouest-africaine », a déclaré le président en exercice de l’UEMOA, le chef de l’Etat burkinabè Roch Marc Christian Kaboré dans son discours d’ouverture. Semblant peu coopérant avec les colonels, il a ajouté que « la conviction que toutes les réformes politiques, économiques et sociales visant la refondation du Mali ne pourraient être conduites que par des autorités démocratiquement élues ».